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Du moins les compliments, dont peut-être ils se jouent,
Sont des civilités qu’en l’âme ils désavouent.


TIRCIS.161


J’y donne une raison de ton sort inhumain.
Allons, je le veux voir présenter de ta main
À ce charmant objet dont ton âme est blessée 162.


ÉRASTE, lui rendant son sonnet 163.


Une autre fois, Tircis ; quelque affaire pressée
Fait que je ne saurois pour l’heure m’en charger.
Tu trouveras ailleurs un meilleur messager.


TIRCIS, seul.


La belle humeur de l’homme ! Ô Dieux, quel personnage !
Quel ami j’avois fait de ce plaisant visage !
Une mine froncée, un regard de travers,
C’est le remercîment que j’aurai de mes vers.
Je manque, à mon avis, d’assurance ou d’adresse,
Pour les donner moi-même à sa jeune maîtresse,
Et prendre ainsi le temps de dire à sa beauté
L’empire que ses yeux ont sur ma liberté.
Je pense l’entrevoir par cette jalousie :
Oui, mon âme de joie en est toute saisie 164.
Hélas ! et le moyen de pouvoir lui parler 165,
Si mon premier aspect l’oblige à s’en aller ?
Que cette joie est courte, et qu’elle est cher vendue 166 !
Toutefois tout va bien, la voilà descendue.
Ses regards pleins de feu s’entendent avec moi 167 ;
Que dis-je ? en s’avançant elle m’appelle à soi.


161. En marge, dans l’édition de 1633 : Il montre du doigt la fin de son sonnet à Éraste.

162. Var. À ce divin objet dont ton âme est blessée. (1633-57)

163. Var. Feignant de lui rendre son sonnet, il le fait choir et Tirsis le ramasse. (1633, en marge.) Il lui rend le sonnet. (1663, en marge.)

164. En marge, dans l’édition de 1633 : Mélite se retire de la jalousie et descend.

165. Var. Hélas ! et le moyen de lui pouvoir parler. (1633-57)

166. Var. Que d’un petit coup d’œil l’aise m’est cher vendue ! (1633-57)

167. Var. Ses regards pleins de feux s’entendent avec moi. (1633-68)