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86 DISCOURS

saire pour le théâtre ; et à moins que cela, les senti- ments des trois Horaces, de leur père, de leur sœur, de Curiace, et de Sabine, se fussent présentés à faire pa- roître tous à la fois^ Le roman, qui ne fait rien voir, en fût aisément venu à bout ; mais sur la scène il a fallu les séparer, pour y mettre quelque ordre, et les prendre l'un après Fautre, en commençant par ces deux-ci, que j'ai été forcé de ramener dans cette salle sans vraisem- blance. Cela passé, le reste de l'acte est tout à fait vrai- semblable, et n'a rien qu'on fût obligé de faire arriver d'une autre manière dans le roman. A la fin de cet acte, Sabine et Camille, outrées de déplaisir, se retirent de cette salle avec un emportement de douleur, qui vraisem- blablement va renfermer leurs larmes dans leur chambre, où le roman les feroit demeurer et y recevoir la nouvelle du combat. Cependant, par la nécessité de les faire voir aux spectateurs, Sabine quitte sa chambre au commen- cement du troisième acte, et revient entretenir ses dou- loureuses inquiétudes dans cette salle, où Camille la vient trouver. Cela fait, le reste de cet acte est vraisemblable, comme en l'autre ; et si vous voulez examiner avec cette rigueur les premières scènes des deux derniers, vous trouverez peut-être la même chose, et que le roman pla- ceroit ses personnages ailleurs qu'en cette salle, s'ils en étoient une fois sortis, comme ils en sortent à la fin de chaque acte.

Ces exemples peuvent suffire pour expliquer comme on peut traiter une action selon le nécessaire, quand on ne la peut traiter selon le vraisemblable, qu'on doit tou- jours préférer au nécessaire lorsqu'on ne regarde que les actions en elles-mêmes.

Il n'en va pas ainsi de leur liaison qui les fait naître

I. Vah. (cdil (le iTifio) : tout à la fois.

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