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sa chair à sa raison, et sa raison à moi,
ne craint plus aucune surprise,
et demeure le maître et du monde et de soi.

Oui, quand l’homme en est là, la bataille est gagnée ;
mais pour y parvenir il faut bien commencer,
avec force et courage empoigner la cognée,
et jusqu’en la racine à grands coups l’enfoncer :
c’est ainsi qu’on détruit, c’est ainsi qu’on arrache
l’amour désordonné qu’on se porte en secret,
et c’est ainsi qu’on se détache
et de l’intérêt propre, et de tout faux attrait.

De ce vice commun, de cet amour trop tendre
où par sa propre main on se laisse enchaîner,
coulent tous les desirs dont il se faut défendre,
s’élèvent tous les maux qu’il faut déraciner ;
de là descend le trouble, et de là prend naissance
tout cet égarement qui brouille tes souhaits ;
et qui peut briser sa puissance
s’assure en même temps une profonde paix.

Mais il en est fort peu dont la vertu sublime
réduise tous leurs soins à bien mourir en eux,