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Si l’inégalité se trouve en leur partage,
si l’un en reçoit plus, si l’autre en reçoit moins,
tout ne laisse pas d’être un effet de tes soins,
et ce plus et ce moins te doivent même hommage.
Sans toi le moindre don ne se peut obtenir,
et qui reçoit le plus se doit mieux prémunir
contre ce doux orgueil où l’abondance invite ;
et de quoi que sur tous il soit avantagé,
il ne doit ni s’enfler de son propre mérite,
ni traiter de mépris le plus mal partagé.

L’homme est d’autant meilleur que moins il s’attribue ;
il est d’autant plus grand qu’il s’abaisse le plus,
et qu’en te bénissant pour tant de biens reçus
il reconnoît en soi sa pauvreté plus nue.
C’est par le zèle ardent, c’est par l’humilité,
c’est par le saint aveu de son indignité
qu’il attire sur lui de plus puissantes grâces ;
et qui se peut juger le plus foible de tous
s’affermit d’autant plus à marcher sur tes traces,
et va d’autant plus haut, qu’il prend mieux le dessous.

Celui pour qui ta main semble être plus avare
doit le voir sans tristesse et souffrir sans ennui ;
et sans porter d’envie aux plus riches que lui,