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Scène VII.

DORANTE, PHILISTE, CLITON.
PHILISTE.

1495Je crois l’entendre.Ami, vous m’avez tôt quitté.

DORANTE.

Sachant fort peu la ville, et dans l’obscurité,
En moins de quatre pas j’ai tout perdu de vue ;
Et m’étant égaré dès la première rue,
Comme je sais un peu ce que c’est que l’amour,
1500J’ai cru qu’il vous falloit attendre en Bellecour ;
Mais je n’ai plus trouvé personne à la fenêtre.
Dites-moi, cependant qui massacroit ce traître ?
Qui le faisoit crier ?

PHILISTE.

Qui le faisoit crier ?À quelques[1] mille pas,
Je l’ai rencontré seul tombé sur des plâtras.

DORANTE.

1505Maraud, ne criois-tu que pour nous mettre en peine ?

CLITON.

Souffrez encore un peu que je reprenne haleine.
Comme à Lyon le peuple aime fort les laquais,
Et leur donne souvent de dangereux paquets,
Deux coquins, me trouvant tantôt en sentinelle,
1510Ont laissé choir sur moi leur haine naturelle ;
Et sitôt qu’ils ont vu mon habit rouge et vert[2]

DORANTE.

Quand il est nuit sans lune, et qu’il fait temps couvert,
Connoît-on les couleurs ? tu donnes une bourde.

  1. Voyez tome I, p. 299, note 1. L’édition de 1692 a quelque, sans s.
  2. Var. Et me prenant pour l’être à l’habit rouge et vert. (1645-56)