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DORANTE.

Tais-toi.

CLITON.

Tais-toi.Vous rêvez, dis-je, ou…

DORANTE.

Tais-toi.Vous rêvez, dis-je, ou…Tais-toi, misérable.

CLITON.

170Vous venez de Poitiers, ou je me donne au diable ;
Vous en revîntes hier.

DORANTE, à Cliton.

Vous en revîntes hier.Te tairas-tu, maraud[1] ?
Mon nom dans nos succès s’étoit mis assez haut
Pour faire quelque bruit sans beaucoup d’injustice ;
Et je suivrois encore un si noble exercice,
175N’étoit que l’autre hiver, faisant ici ma cour,
Je vous vis, et je fus retenu par l’amour.
Attaqué par vos yeux, je leur rendis les armes ;
Je me fis prisonnier de tant d’aimables charmes ;
Je leur livrai mon âme ; et ce cœur généreux
180Dès ce premier moment oublia tout pour eux.
Vaincre dans les combats, commander dans l’armée,
De mille exploits fameux enfler ma renommée[2],
Et tous ces nobles soins qui m’avoient su ravir,
Cédèrent aussitôt à ceux de vous servir.

ISABELLE, à Clarice, tout bas.

185Madame, Alcippe vient ; il aura de l’ombrage[3].

  1. Var. Vous en revîntes hier.Maraud, te tairas-tu ?
    (À Clarice.) Avec assez d’honneur j’ai souvent combattu,
    Et mon nom a fait bruit peut-être avec justice.
    CLAR. Qui vous a fait quitter un si noble exercice ?
    DOR. Revenu l’autre hiver pour faire ici ma cour. (1644-56)
  2. Ces deux vers ont quelque rapport avec les vers 189 et 190 du Cid :
    Attaquer une place, ordonner une armée,
    Et sur de grands exploits bâtir sa renommée.
  3. Var. Madame, Alcippe approche ; il aura de l’ombrage. (1644-56)