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choisies et restituées par Monsieur ***, et portant pour adresse : À Amsterdam, chez F. Changuion. Ce recueil, composé d’une manière assez bizarre, renferme le Cid, le don Japhet de Scarron, la Mariane de Tristan et le Florentin de la Fontaine. Rien de plus curieux que la façon dont l’éditeur, qui passe pour n’être autre que Jean-Baptiste Rousseau, restitue les pièces qu’il publie. Pour Mariane, il annonce que son travail n’a consisté ce que dans le retranchement, la correction ou le supplément de cent cinquante ou cent soixante vers tout au plus. »

Il ne respecte pas plus Corneille que Tristan. Dans le Cid, il fait disparaître sans scrupule trois personnages, l’Infante, Léonor et le Page, et supprime par conséquent les nombreux passages du rôle de Chimène où celle-ci s’adresse à l’Infante. « Ce n’est point, dit-il, faire tort à un beau visage que d’en enlever une tache, et plus un ouvrage est digne d’estime, plus il mérite qu’on prenne soin d’en ôter ce qui le défigure. C’est ce qu’on a essayé de faire ici, et il n’en a coûté pour cela que le supplément de deux vers de liaison au second acte et de deux autres au cinquième, qu’il a fallu nécessairement y ajouter, et que, par respect pour le grand Corneille, on a pris soin de distinguer par ces virgules à qui les imprimeurs donnent le nom de guillemets, et qui se trouvent dans les éditions de Molière aux endroits de ses pièces, que les comédiens ont coutume de couper dans les représentations. »

Au deuxième acte, c’est en tête de la scène entre don Fernand, don Arias et don Sanche que se place, assez gauchement, la liaison ajoutée par l’éditeur :

« Quoi me braver encor après ce qu’il a fait !
Par la rébellion couronner son forfait ! »

Enfin, au commencement de la dernière scène de l’ouvrage, ces deux vers dits par l’Infante :

Sèche tes pleurs, Chimène, et reçois sans tristesse
Ce généreux vainqueur des mains de ta princesse,


sont remplacés par ceux-ci, que prononce don Fernand :

« Approche-toi, Rodrigue, et toi reçois, ma fille,
De la main de ton roi, l’appui de la Castille. »

Il est difficile d’imaginer des changements plus malheureux,