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hein ?… Vous vous rappelez mon teint de lis et de rose ?… Eh bien, mes enfants, voilà ce qu’en ont fait les dames du pays des Nez-Jaunes.

SUZANNE.

Comment ?

JIM-COCKS.

Je ne veux compromettre personne… mais j’ai eu quelques succès… et autant de nuances… autant de victimes… c’est une habitude de l’endroit. Enfin, un jour, dans une affaire commerciale, je fus échangé par ma dernière, la Rosée du Matin, contre une bouteille de rhum.

SUZANNE.

Oh ! l’ingrate !

JIM-COCKS.

Je passai ainsi des Nez-Jaunes aux Mains-Rouges. De ces mains-là je fus sauvé, non plus par ma beauté, mais par mes talents. Je remarquai que, dans leurs fêtes, dominait le côté musique et pantomine… J’avais été comédien !

TOBY.

Oui… oui… je sais.

JIM-COCKS.

J’entrepris d’initier ces sauvages aux douceurs de l’art dramatique. Je montai un opéra !…

SUZANNE et TOBY.

Un opéra !

JIM-COCKS.

Avec les airs et les instruments de la localité. L’opéra de l’avenir. Quelques chanteurs laissaient bien un peu à désirer… mais j’avais eu la chance de tomber sur un ténor… un ténor comme on n’en verra jamais à Londres… ni à Paris, du reste, et pour rien, un pantalon de coutil !

TOBY.

J’aurais voulu assister à la première.

JIM-COCKS.

Il eut un succès fou ! Des colliers de dents d’éléphants, des couronnes de noix de cocos !… tout cela pleuvait à ses pieds !… Je crus ma fortune faite ! Mais, le lendemain, au moment de frapper les trois coups, plus de ténor !…