Page:Corbière - Les Amours jaunes, 1926.djvu/34

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

gaucheries d’échassier dont on a rogné les ailes, la mer en refaisait un homme et l’égal des plus robustes, un matelot « premier brin ». Verlaine parle des « prodiges d’imprudence folle » qu’il accomplissait sur son cotre le Négrier. Il n’y a rien là d’exagéré. Vingt fois il faillit couler dans les terribles chenaux de la côte léonarde ; il attendait exprès, pour s’embarquer, que le cône des basses pressions atmosphériques fût hissé à la drisse du sémaphore ; il eût souhaité peut-être que la sirène répondît à ses provocations et, par quelque belle nuit d’équinoxe, le couchât dans sa robe étoilée…

V

Ce ne fut pas la mer qui le prit. Une femme passa, une « parisienne ». Belle jeune, élégante et titrée, elle devina le secret si bien caché à tous les yeux ; elle aima Corbière : il était trop tard, et cette conjonction romanesque d’une héroïne de Feuillet et d’un triton des eaux bretonnes n’enrichit pas d’un brillant chapitre la littérature sentimentale du xixe siècle.