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faire une longue promenade pour arriver à Cambridge, Madame ; mais il était impossible de toucher ce soir à un autre point du territoire occupé par les rebelles, où, comme vous le voyez, nous aurions été obligés de marcher en face de leurs canons.

Cécile, se prêtant à la conversation pour remercier le jeune officier du désir qu’il montrait évidemment de lui faire paraître la traversée moins longue par son entretien, lui répondit : — N’est-il pas bien singulier que les colons, qui bloquent la ville de si près au nord et à l’ouest, négligent totalement de l’attaquer du côté du midi ? car je crois qu’ils n’ont jamais cherché à occuper les montagnes de Dorchester ; et cependant c’est un des points les plus près de Boston.

— Il n’y a là aucun mystère, dit le jeune homme en secouant la tête avec l’air de sagacité d’un vétéran ; ce serait vouloir s’attirer sur les oreilles une autre affaire de Bunker-Hill, car vous voyez que les hauteurs de Dorchester sont de ce côté exactement la même chose que celles de Charleston de l’autre. — Maniez légèrement vos rames, vous autres, très-légèrement. Et il baissa lui-même la voix, à mesure qu’on approchait du rivage. — D’ailleurs, Madame, une batterie placée sur cette hauteur pourrait jeter des dragées sur nos navires, ce que notre vieil amiral ne souffrirait pas ; il en résulterait donc ou qu’il y aurait une bataille rangée dans toutes les règles, ou que la flotte s’éloignerait, et alors que deviendrait l’armée de terre ? Non, non, les rebelles ne voudraient pas risquer de chasser les morues de leur baie en faisant une pareille tentative. — Les rames en repos, allons, camarades ; je veux examiner s’il n’y a pas quelques Yankies qui soient à prendre le frais au clair de lune le long du rivage.

Les marins obéissants cessèrent leur travail à l’instant, et le midshipman prenant une longue-vue, reconnut avec soin tous les environs de l’endroit où il comptait débarquer. Cet examen lui ayant paru satisfaisant, il ordonna aux rameurs de se diriger vers une petite anse où l’ombre des montagnes pouvait faciliter un débarquement secret.

À compter de ce moment, on observa le plus profond silence, la barque avançant rapidement, mais avec précaution, vers l’endroit indiqué : elle y arriva bientôt ; on entendit la quille toucher le fond, et bientôt l’esquif devint stationnaire. Le jeune midshipman aida Cécile à sortir de la barque, et sautant ensuite sur le