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struit sur une hauteur assez escarpée pour former une barrière contre les attaques ou les invasions.

L’intérieur du bâtiment offrait un aspect beaucoup plus agréable que l’extérieur. Les fenêtres donnaient à la cour un air de vie et de gaieté, et rompaient l’uniformité de cette masse de bois, accumulée sans goût et sans symétrie. Je savais que mon grand-père Mordaunt avait fait disposer quelques appartements pour son usage personnel. Je ne fus donc pas surpris, en entrant dans la maison, de trouver des pièces qui, sans être meublées avec beaucoup d’élégance, offraient du moins tout ce qui était nécessaire.

— Nous trouverons Ursule par ici, me dit le porte-chaîne en ouvrant une porte et en me faisant signe de le suivre ; Allez, Mordaunt, allez serrer la main de cette chère enfant ; elle vous connaît de nom et de réputation, je vous en réponds.

J’entrai, et je me trouvai à deux pas de ma belle apparition, de celle dont la présence nous avait sauvés tous. Elle avait la même robe que lorsque je l’avais vue pour la première fois, quoique la différence de son attitude lui donnât une toute autre expression. Ursule était occupée alors à ourler un de ces gros mouchoirs à carreaux dont se servait son oncle, par économie. Elle se leva à mon arrivée, en répondant par une grave révérence qui n’était pas sans grâce, à mon profond salut.

— Allons, dit André, pas tant de cérémonie, donnez-vous la main, mes enfants. Vous savez, Ursule, que Mordaunt Littlepage est comme un fils pour moi.

Ursule obéit, et j’eus le plaisir de tenir sa petite main, douce comme le velours, un moment dans la mienne. J’éprouvai une satisfaction que je ne saurais décrire en sentant qu’elle était si douce, puisque c’était la preuve qu’elle n’en était pas réduite à se livrer à des travaux pénibles et grossiers. Je savais qu’André avait quelques esclaves ; c’était même tout ce qu’il possédait, outre sa boussole, ses chaînes et son épée ; et c’était, sans doute, à ces esclaves, tout vieux et tout épuisés qu’ils devaient être alors, que la nièce devait d’être affranchie de tout service manuel.

Je tenais toujours la main d’Ursule, mais je ne pouvais sur-