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caractère qui leur appartenait. Un corps nombreux de lanciers, commandé par le comte de Tréviño en personne, composait son escorte, et le 10 du mois la cavalcade arriva à Dueñas, dans la province de Léon, place voisine de Valladolid. Les nobles mécontents vinrent en foule faire leur cour au prince, et il fut reçu d’une manière convenable à son rang et à sa destinée encore plus élevée.

Les Castillans, plus adonnés au luxe, eurent alors l’occasion de remarquer par quelle sévère discipline Ferdinand, dès l’âge de dix-huit ans, — car il n’était pas plus âgé, — avait réussi à s’endurcir le corps et à se fortifier les nerfs, de manière à être capable des plus hauts faits d’armes. Il prenait plaisir aux exercices militaires les plus difficiles, et nul chevalier du royaume d’Aragon ne pouvait mieux conduire son coursier dans un tournoi ou sur le champ de bataille. Comme la plupart des princes des races royales de ce temps et même du nôtre, il avait un teint naturellement brillant, quoiqu’il eût déjà été bruni par les amusements de la chasse et par ses occupations guerrières, dans sa première jeunesse. Sobre comme un musulman, son corps actif et bien proportionné semblait s’être endurci de bonne heure, comme si la Providence l’eût réservé pour l’exécution de quelques-uns de ses desseins qui exigeaient une grande force de corps, aussi bien qu’une profonde prévoyance et une sagacité vigilante. Pendant les quatre ou cinq jours suivants, les nobles castillans qui entendaient ses discours ne savaient ce qu’ils devaient admirer le plus de son éloquence facile ou de la prudence de ses pensées et de ses expressions, prudence qu’on aurait pu considérer comme prématurée, froide et mondaine, mais qu’on regardait comme un mérite dans un jeune prince destiné à tenir en bride les passions opposées, la perfidie et l’égoïsme des hommes.