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quoiqu’il prît la main de la jeune fille avec tendresse, — je n’ai point mérité de semblables paroles. Je sais que je suis un homme grossier, brusque, gauche…

— Pathfinder !

— Bien, bien, oublions ce que vous venez de dire, vous ne le pensiez pas. Il est inutile maintenant de songer à nous échapper, puisque le sergent n’est pas transportable. Le fort doit être défendu, coûte que coûte. Peut-être Lundie sera-t-il instruit de nos désastres et nous enverra-t-il un détachement pour faire lever le siège.

— Pathfinder ! — Mabel ! — dit le sergent qui avait réuni toutes ses forces pour combattre ses souffrances, et dont une sueur froide couvrait le front, — venez tous deux près de moi. Vous vous entendez l’un l’autre, j’espère ?

— Mon père, ne dites rien à ce sujet. Tout est suivant vos désirs.

— Que Dieu soit loué ! Donnez-moi votre main, Mabel ! Pathfinder, prenez-la, je ne puis rien faire de plus que de vous la donner de cette manière. Je sais que vous serez pour elle un bon mari. Ne différez pas votre union à cause de ma mort ; il viendra un chapelain à Oswego avant la fin de la saison, qu’il vous marie aussitôt. Mon frère, s’il vit, désirera retourner à son bâtiment, et mon enfant n’aura plus de protecteur. Mabel, votre mari aura été mon ami, et ce sera une consolation pour vous, j’espère.

— Reposez-vous sur moi du soin de cette affaire, — répondit Pathfinder ; — laissez tout entre mes mains, comme les derniers souhaits d’un mourant ; et, croyez-moi, tout sera exécuté comme tout cela doit l’être.

— Je mets toute ma confiance en vous, mon fidèle ami, et je vous donne plein pouvoir d’agir en tout comme j’aurais pu agir moi-même. Mabel, mon enfant… donnez-moi de l’eau… vous ne vous repentirez jamais de cette nuit… Que Dieu vous bénisse, ma fille, que Dieu vous bénisse et vous tienne en sa sainte garde.

Cette tendresse était touchante au-delà de toute expression pour le cœur de Mabel, et elle sentait dans le moment que son union avec Pathfinder venait de recevoir une sanction qu’aucune cérémonie de l’église ne pouvait rendre plus sainte. Cependant un poids plus lourd qu’une montagne pesait sur son cœur, et elle pensait que ce serait un bonheur pour elle de mourir. Un silence de quelques minutes s’ensuivit, et le sergent, en phrases entre-