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et les autres parties de l’office, au milieu du calme de la nuit ; produisaient un effet doublement touchant et solennel. La voix harmonieuse qu’on avait entendue dans la matinée, ou plutôt le jour précédent, car minuit était sonné, se fit entendre encore, et elle produisait un effet non moins puissant même sur ceux qui étaient habitués à cette céleste mélodie. À mesure que la messe avançait, les gémissements de l’anachorète devinrent si distincts, que par moments l’expression de sa douleur menaçait d’interrompre la cérémonie. Le cœur d’Ulrike répondait et chaque soupir qui s’échappait du sein d’odo, et avant que les premières prières fussent terminées, son visage était baigné de larmes.

L’examen des différents visages de la confrérie, pendant cette scène, aurait été une étude digne d’un observateur des nuances du caractère humain, ou de ceux qui aiment à suivre les différents effets produits par une même cause. Tous les gémissements de l’anachorète éclairaient les traits du père Johan d’une espèce de sainte émotion, comme si cette influence du service divin eût été un triomphe pour lui, et à chaque minute il penchait la tête dans la direction de la balustrade, afin que son oreille saisît les plus faibles sons qui se faisaient entendre de ce côté. Les traits du prieur étaient empreints de douleur et de pitié : chaque soupir qu’il entendait éveillait sa sympathie ; sympathie mêlée d’une pieuse joie, il est vrai, mais qui n’en était pas moins vive. Boniface écoutait d’un air digne, froid, et ne s’inquiétant de ce qui se passait que pour donner au service l’attention convenable. De temps en temps même il appuyait sa tête sur sa main, réfléchissant à des choses qui avaient peu de rapport à ce qui se passait sous ses yeux. Les autres religieux montraient plus ou moins de dévotion, suivant leurs différents caractères ; quelques-uns même trouvaient le moyen de dormir quelques instants, lorsque le service le leur permettait.

C’est de cette manière que la communauté de Limbourg passa la première heure du jour, ou plutôt de la matinée qui suivit le dimanche. Dans la suite, ce fut sans doute une source de consolations de l’avoir ainsi passée, parmi ceux qui étaient les plus zélés dans l’observance de leurs devoirs ; car il s’apprêtait des événements qui eurent une longue influence, non seulement sur leurs propres destinées, mais sur celles du pays qu’ils habitaient.

Les sons du dernier hymne s’élevaient vers les voûtes au-dessus