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et lorsqu’elles arrivèrent assez près pour la découvrir, elles virent Mrs Fitzgerald qui guettait l’arrivée d’Émilie.

Mrs Fitzgerald, à peine âgée de vingt ans, portait sur tous ses traits l’empreinte d’une mélancolie qui inspirait l’intérêt le plus vif ; ses manières étaient douces et très-réservées ; il était évident qu’elle avait toujours vécu, sinon dans le grand monde, du moins dans la bonne compagnie.

Elle parut extrêmement sensible au souvenir d’Émilie, et remercia les deux dames d’avoir poussé la bonté jusqu’à venir la chercher dans sa solitude. Elle leur présenta sa compagne sous le nom de dona Lorenza, et l’intimité la plus parfaite s’établit bientôt entre les nouvelles amies.

La jeune veuve, car ses habits de deuil ne prouvaient que trop la perte qu’elle déplorait, fit les honneurs de chez elle avec une aisance pleine de grâce ; elle conduisit ses amies dans son petit jardin, dont l’arrangement, ainsi que celui de la maison, attestait le goût et l’élégance de celle qui l’habitait.

Deux femmes et un vieux domestique formaient toute sa maison : elle avait pris la résolution de ne point sortir de sa retraite ; mais si Mrs Wilson et miss Moseley voulaient bien l’excuser si la retraite absolue à laquelle elle s’était condamnée l’empêchait de leur rendre leurs visites, rien ne pourrait lui faire plus de plaisir que de les recevoir le plus souvent possible.

Mrs Wilson prenait un vif intérêt aux infortunes que paraissait éprouver une si jeune femme, et elle était si touchée de sa modeste résignation, qu’elle lui accorda facilement la promesse qu’elle sollicitait. Émilie s’acquitta de la commission de John, et Mrs Fitzgerald accueillit avec un triste sourire la demande qu’elle renfermait. — M. Moseley, répondit-elle, lui avait imposé de trop grandes obligations, dès leur première entrevue, pour qu’elle pût se refuser le plaisir de l’en remercier de nouveau ; mais elle les suppliait de l’excuser si elle les priait de ne lui amener aucun autre de leurs amis, car il n’y avait qu’un seul homme en Angleterre dont elle eût reçu les visites, encore ne l’avait-elle vu qu’une fois depuis qu’elle était dans le comté de Norfolk.

Après lui avoir promis de se conformer à ses désirs et de revenir bientôt, la tante et la nièce reprirent le chemin de Benfield-Lodge, où elles arrivèrent à temps pour faire leur toilette pour le dîner.