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CONTES SECRETS RUSSES


XLII

LE PÈRE SPIRITUEL


Le grand carême était arrivé, un paysan se disposa à aller à confesse. Il mit dans un sac une bûche de bouleau, ficela l’ouverture du sac et vint trouver le pope. « Eh bien ! parle, mon cher : quels péchés as-tu commis ? Mais qu’est-ce que tu as là ? — C’est un saucisson blanc que je t’apporte, batouchka. — Eh bien ! tant mieux. Il est gelé,

    et donna le jour à onze petits. « Notre truie a fait des jeunes ! » s’écria la fille du pope ; « ah, comme je désirais avoir un cochon de lait ! — Eh bien quoi ? » dit l’ouvrier ; « prenons-en un, nous le tuerons et nous le ferons rôtir. — Mon père le saura. — Allons donc, comment le saura-t-il ? Parce qu’il est pope, n’est-ce pas ? Une truie n’a pas toujours le même nombre de petits : c’est tantôt six, tantôt dix ou plus. » Ils prirent un des cochons de lait, le tuèrent et, après l’avoir échaudé, le placèrent sur une lèchefrite qu’ils mirent dans le poêle. Bientôt toute la maison fut remplie de fumée. Pendant ces opérations culinaires, la jeune fille et l’ouvrier aperçurent tout à coup le pope qui revenait chez lui : quel diable le ramène ? que faire ? où mettre le cochon de lait ? « Passe ta tête par la fenêtre, » dit l’ouvrier à la fille du pope, « et regarde si ton père est encore loin, moi, je cacherai la bête. » Tandis qu’elle se penchait à la croisée, l’ouvrier fourra le cochon de lait sous une natte ;