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La Belle à qui la douleur avoit presque ôté la connoissance, faisant taire ses sanglots & ses soupirs, dit à ses sœurs : je suis coupable de ce malheur : c’est à moi seule de le réparer. J’avoue qu’il seroit injuste que vous souffrissiez de ma faute. Helas ! Elle est pourtant bien innocente. Pouvois-je prévoir que le désir d’avoir une Rose au milieu de l’Eté, devoit être punie par un tel supplice. Cette faute est faite : que je fois innocente ou coupable, il est juste que je l’expie. On ne peut l’imputer à d’autre. Je m’exposerai, poursuivit-elle d’un ton ferme, pour tirer mon pere de son fatal engagement. J’irai trouver la Bête, trop heureuse en mourant de conserver la vie à celui de qui je l’ai reçue, & de faire cesser vos murmures. Ne craignez pas que rien m’en puisse détourner. Mais de grace pendant ce mois donnez-moi le plaisir de ne plus entendre vos reproches.