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introduction.

jourd'hui, il aura besoin demain de se défendre d'être guidé par cet esprit de corps qui naît à l'instant même où les homnnes se réunissent entre eux, et contre lequel la sagesse humaine n'a encoie pu trouver de préservatif. Une main bienfaisante a offert à un peuple reconnaissant le seul remède capable de guérir des maux dont on ne peut plus cacher l'étendue ni le danger ; mais un remède mal préparé peut devenir un poison.

C'est ici le moment où chaque citoyen doit offrir à son pays le tribut de ses réflexions, soumettre ses pensées à ceux qu'un intérêt commun unit avec lui. Heureux, si, de ses erreurs mêmes, d'autres peuvent, en les réfutant, faire naître des vérités utiles ! En déclarant ses premiers règlements provisoires, le gouvernement semble lui-même avoir invité tous les citoyens à les discuter et à publier le résultat de leurs observations ; il a senti que, dans une nation où les simples citoyens ont été si longtemps écartés de toute fonction publique, où jamais la discussion des principes de l'administration n'a été libre, il fallait réunir toutes les lumières, écouter toutes ces voix auxquelles, pour la première fois, il est permis de se faire entendre.

Je n'ai rien négligé pour rendre facile la lecture de cet ouvrage ; mais, malgré mes efforts, je sens qu'elle exigera nécessairement une attention soutenue,