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vant nous, sur la terrasse, jeta un regard dans le salon, et, nous voyant occupés, continua lentement sa promenade.

Voici ce qu’en commençant me lut miss Halcombe :

« Je dois vous ennuyer, mon cher Philip, en vous parlant sans cesse de mes écoles et de mes écoliers. Rejetez-en la faute, je vous prie, sur la monotonie un peu fastidieuse de la vie qu’on mène à Limmeridge. Cette fois, d’ailleurs, j’ai quelque chose à vous dire, au sujet d’une élève, tout récemment entrée chez nous.

» Vous connaissez la vieille mistress Kempe, notre marchande par excellence. Eh bien ! le docteur a fini par désespérer d’elle, et la voilà qui s’éteint de jour en jour. La seule parente qui lui reste au monde, une sœur, est arrivée la semaine dernière pour la soigner. Cette sœur nous vient tout droit du Hampshire ; — son nom est mistress Catherick. Il y a quatre jours, mistress Catherick est venue me voir, m’amenant son enfant unique, charmante petite fille, d’un an à peu près plus âgée que notre chère Laura. »

Au moment où cette fin de phrase passait sur les lèvres de la lectrice, miss Fairlie vint encore une fois à traverser la terrasse. Elle se fredonnait à elle-même une de ces mélodies que, peu d’instants avant, elle avait exécutées sur le piano. Miss Halcombe attendit que sa sœur eût disparu, puis elle reprit la lecture commencée.

« Mistress Catherick est une femme dont l’attitude est bonne, dont les dehors sont décents, et qui sait se faire respecter ; elle n’est ni jeune, ni vieille, et conserve les restes d’une beauté qui n’a jamais dû être de premier ordre. Dans ses façons et ses dehors, cependant, quelque chose me déroute et m’intrigue. Elle est sur son passé d’une réserve, d’une discrétion presque absolues, et, dans sa physionomie, il y a quelque chose — je ne saurais dire ce que c’est, — qui me fait penser qu’elle a sur la conscience un remords, un fardeau quelconque. Vous l’appelleriez « un mystère vivant. » Cependant, l’objet qui l’a