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teront pas. Encore à la charge avec le bélier ! Une, deux, trois, et en avant ! Un panneau a fléchi ! La flamme nous arrive en jets étroits par les crevasses qui se sont faites de tous côtés. Un autre élan, et c’est le dernier ! La porte craque et tombe. Un grand silence d’épouvante, une anxiété haletante et qui nous tient immobiles, semblent tout à coup nous avoir paralysés. Nos regards cherchent le cadavre. L’ardente chaleur qui nous vient au visage nous oblige à reculer : du reste, on ne voit rien ; en bas, en haut, dans toute la salle, nous ne discernons qu’une nappe de flammes mobiles.

— Où est-il ? murmura le domestique, dont l’œil hagard restait fixé sur l’ardente fournaise.

— Cendres et poussière, répondit le clerc, et nos registres aussi, cendres et poussière… et l’église aussi, messieurs, ne sera bientôt que poussière et cendres !…

Ces deux hommes seuls prirent la parole. Lorsqu’ils se turent, rien ne troubla notre silence de mort, si ce n’est la rumeur sourde et les craquements de l’incendie.

Écoutez !

On entend au loin un roulement métallique, puis le piétinement amorti de chevaux qui galopent, — puis le mugissement tumultueux de cent voix humaines criant à la fois. Les pompes arrivent enfin !

Ceux qui m’entouraient quittent l’incendie, et montent en courant la colline. Le vieux clerc voudrait les suivre, mais ses forces sont épuisées. Je le vois encore s’appuyer à l’une des tombes : — Sauvez l’église ! sauvez l’église ! criait-il de sa voix affaiblie, comme si les pompiers pouvaient déjà l’entendre.

Le domestique seul restait immobile. Les pieds fixés au sol, il contemplait, d’un regard sans expression et toujours le même, les flammes ruisselantes. Je lui parlai : je le secouai par le bras ; rien ne pouvait l’arracher à sa léthargie. Une fois seulement, il répéta sa première question : — Où est-il ? demandait-il à voix basse.

En dix minutes, la pompe eut pris position ; une fontaine, au chevet de l’église, l’alimentait abondamment.