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la compagne d’Anne Catherick, de la femme au châle, de celle qu’elle appelait mistress Clements.

— J’arrive ! j’arrive !… criait cette voix de derrière le bouquet d’arbres nains.

L’instant d’après, en effet, nous vîmes arriver en toute hâte mistress Clements.

— Qui êtes-vous ? cria-t-elle, m’interpellant résolument dès qu’elle eut le pied en dedans de la barrière. Comment vous permettez-vous de faire peur à une pauvre créature comme celle-ci ?…

Avant que j’eusse pu répondre, elle s’était élancée aux côtés d’Anne Catherick et la soutenait, le bras passé sous sa taille… Qu’y a-t-il, chère enfant ? Que vous a-t-on fait ?

— Rien au monde, répliqua la pauvre fille… Rien… J’ai eu peur, et voilà tout !…

Mistress Cléments se retourna vers moi avec une hardiesse indignée dont je lui sus gré.

— J’aurais honte de moi-même si je méritais le regard que vous me jetez, lui dis-je. Mais il n’en est rien. Sans le vouloir, et par un simple malentendu, j’ai effarouché votre protégée… Ce n’est point la première fois que nous nous voyons. Demandez-le-lui à elle-même !… Elle vous dira que je ne suis pas homme à offenser volontairement ni elle, ni aucune autre femme…

Je parlais nettement, appuyant sur chaque mot, de manière à me faire entendre et comprendre d’Anne Catherick. Je vis que j’y étais parvenu, et qu’elle saisissait le sens, la portée de mes paroles.

— Oui, dit-elle… oui, certainement… Il a été bon pour moi… Il m’a secourue jadis… — Elle acheva sa phrase à l’oreille de son amie.

— Étrange rencontre, véritablement, dit mistress Cléments, qui semblait assez perplexe… Après tout néanmoins, c’est bien différent. Je suis fâchée, monsieur, de vous avoir parlé si rudement, mais vous conviendrez que, pour une personne qui ne vous connaissait pas, les apparences étaient peu favorables… Du reste, c’est ma faute plus que la vôtre, puisque j’ai cédé à ses bizarres