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ter les mains ; il joua Di tanti palpiti. Un orgue qui passait dans la rue fit entendre aussitôt le chœur des montagnards de la Dame blanche ; une grisette se mit à sa fenêtre ; le son d’un cor de chasse partit de l’entresol d’un marchand de vin, et fit pousser à un petit chien les plus affreux gémissemens. Garnier se sentit inondé du sentiment de l’harmonie, et un déluge de pleurs s’apprêtait à le soulager, lorsqu’on tira le cordon de la sonnette.

Un domestique en livrée parut à la porte. Garnier le reconnut, c’était celui du jeune trois étoiles, son ami d’enfance et son camarade de collége. Souvent l’équipage bruyant de l’homme de plaisir s’était arrêté à la porte du modeste étudiant ; souvent Garnier, rasant les boutiques sur la pointe du pied, comme une hirondelle en temps de pluie, s’était rendu à l’hôtel splendide du père de trois étoiles, après avoir, du bout de ses gants beurre frais, soulevé légèrement le marteau nouvellement verni ; ses bas de soie mouchetés de crotte s’étaient enfoncés avec onction dans la laine moelleuse des tapis. Souvent inondé de vin, Garnier avait passé de bonnes heures au bruit des verres et des assiettes, et parfois au dessert, les coudes sur la table, il avait décoché l’anecdote concise dont le trait, tant soit peu satanique, déridait le noble foyer. — Jamais la figure osseuse et abasourdie du laquais