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toutes ses petites griffes, qui se collèrent comme des ventouses à la branche où je la reposai.

— Maman, elle a tout dévoré !

Les yeux gris, derrière les lunettes, allaient du lyciet tondu à la chenille, de la chenille à moi, perplexes :

— Eh, qu’est-ce que j’y peux faire ? D’ailleurs, le lyciet qu’elle mange, tu sais, c’est lui qui étouffe le chèvrefeuille…

— Mais la chenille mangera aussi le chèvrefeuille…

— Je ne sais pas… Mais que veux-tu que j’y fasse ? Je ne peux pourtant pas la tuer, cette bête…

Tout est encore devant mes yeux, le jardin aux murs chauds, les dernières cerises sombres pendues à l’arbre, le ciel palmé de longues nuées roses — tout est sous mes doigts : révolte vigoureuse de la chenille, cuir épais et mouillé des feuilles d’hortensia — et la petite main durcie de ma mère.