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Je baissai le nez, maladroite à aimer, honteuse de ce que j’avais de plus pur :

— Je pensais quelquefois, la nuit, à l’heure de l’araignée, quand je ne dormais pas…

— Minet-Chéri, tu ne dormais pas ? on t’avait donc mal couchée ?… L’araignée est dans sa toile, je suppose. Mais viens voir si ma chenille est endormie. Je crois bien qu’elle va devenir chrysalide, je lui ai mis une petite caisse de sable sec. Une chenille de paon-de-nuit, qu’un oiseau avait dû blesser au ventre, mais elle est guérie…

La chenille dormait peut-être, moulée selon la courbe d’une branche de lyciet. Son ravage, autour d’elle, attestait sa force. Il n’y avait que lambeaux de feuilles, pédoncules rongés, surgeons dénudés. Dodue, grosse comme un pouce, longue de plus d’un décimètre, elle gonflait ses bourrelets d’un vert de chou, cloutés de turquoises saillantes et poilues. Je la détachai doucement et elle se tordit, coléreuse, montrant son ventre plus clair et