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ronron sourd et m’offrit son ventre sans défense. Une pelote de laine, qu’elle reçut en récompense, l’affola : de combien d’agneaux, enlevés aux maigres pâtures africaines, reconnaissait-elle, lointaine et refroidie, l’odeur ?…

Elle coucha dans un panier, se confia au bassin de sciure comme un chat bien appris, et quand je m’étendis dans l’eau tiède, sa tête rieuse et terrible parut, avec deux pattes, au rebord de la baignoire…

Elle aimait l’eau. Je lui donnai souvent, le matin, une cuvette d’eau, qu’elle vidait à grands jeux de pattes. Toute mouillée, heureuse, elle ronronnait. Elle se promenait, grave, une pantoufle volée entre les dents. Elle précipitait et remontait vingt fois sa boule de bois dans le petit escalier. Elle accourait à son nom : « Bâ-Tou » avec un cri charmant et doux, et demeurait rêvant, les yeux ouverts, nonchalante, aux pieds de la femme de chambre qui cousait. Elle mangeait sans hâte et cueillait délicatement la viande au bout