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Elle était déjà hors de vue, mais sa voix nous arrivait encore, un soprano nuancé, vacillant pour la moindre émotion, agile, sa voix qui propageait jusqu’à nous et plus loin que nous les nouvelles des plantes soignées, des greffes, de la pluie, des éclosions, comme la voix d’un oiseau invisible qui prédit le temps…

Le dimanche, elle manquait rarement la messe. L’hiver, elle y menait sa chaufferette, l’été son ombrelle ; en toutes saisons un gros paroissien noir et son chien Domino, qui fut tour à tour un bâtard de loulou et de fox, noir et blanc, puis un barbet jaune.

Le vieux curé Millot, quasi subjugué par la voix, la bonté impérieuse, la scandaleuse sincérité de ma mère, lui remonta pourtant que la messe ne se disait pas pour les chiens.

Elle se hérissa comme une poule batailleuse :

— Mon chien ! Mettre mon chien à la porte de l’église ! Qu’est-ce que vous craignez donc qu’il y apprenne ?