d’enfant répondait par un bond pénible. Ma mère reparaissait rayonnante, et mon père abaissait devant son visage, barbu comme un paysage forestier, le journal le Temps :
— Eh bien ?
— Ça y est ! s’écriait ma mère. Je l’ai !
— Le Curé ?
— Non, voyons ! La bouture du pélargonium qu’il gardait si jalousement, tu sais, celui dont les fleurs ont deux pétales pourpre foncé et trois pétales roses ? La voilà, je cours l’empoter…
— Tu lui as bien savonné la tête au sujet de la petite ?
Ma mère tournait vivement, sur le seuil de la terrasse, un charmant visage, étonné, coloré :
— Oh ! non, quelle idée ! Tu n’as aucun tact ! Un homme qui non seulement m’a donné la bouture de son pélargonium, mais qui encore m’a promis son chèvrefeuille d’Espagne, à petites feuilles panachées de blanc, celui dont on sent d’ici l’odeur, tu sais, quand le vent vient d’ouest…