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camarades d’école. Les noirs matins d’hiver, à sept heures, je me rendormais assise, devant le feu de bois, sous la lumière de la lampe, pendant que ma mère brossait et peignait ma tête ballante. C’est par ces matins-là que m’est venue, tenace, l’aversion des longs cheveux… On trouvait de longs cheveux pris aux basses branches des arbres dans le jardin, de longs cheveux accrochés au portique où pendaient le trapèze et la balançoire. Un poussin de la basse-cour passa pour estropié de naissance, jusqu’à ce que nous eussions découvert qu’un long cheveu, recouvert de chair bourgeonnante, ligotait étroitement l’une de ses pattes et l’atrophiait…

Cheveux longs, barbare parure, toison où se réfugie l’odeur de la bête, vous qu’on choie en secret et pour le secret, vous qu’on montre tordus et roulés, mais que l’on cache épars, qui se baignent à votre flot, déployés jusqu’aux reins ? Une femme surprise à sa coiffure fuit comme si elle était nue. L’amour et l’alcôve ne vous voient guère plus que