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téraire, — à ce point que c’est à eux qu’est due l’introduction la conservation de l’écriture en ce pays, — mais il était encore, on le devine, religieux, bien qu’idolâtrique. Aujourd’hui la situation est tout autre : toutes les écoles appartiennent à l’État ; et dans ces écoles, on ne peut parler de religion : l’enseignement doit être affranchi de toute tendance religieuse quelconque. De là le dégoût des élèves pour les vérités de la religion. Et comme ce système dure déjà depuis plusieurs années, de là aussi l’absence de toute éducation religieuse dans les familles dont les parents ont suivi les écoles de l’État. Une autre cause est l’appât des richesses. On le sait, depuis que le Japon est ouvert à l’étranger, il s’est totalement transformé. À l’heure qu’il est, il jouit d’une prospérité matérielle, relative, et beaucoup sont devenus subitement riches. La richesse ! voilà donc le grand appât, le seul but vers lequel ces pauvres païens concentrent toute leur vie. D’où, plus de temps pour s’occuper des choses de l’au-delà. D’ailleurs, d’après eux, y a-t-il bien une autre vie, puisqu’ils n’ont reçu sur ce sujet, aucune éducation religieuse, rien qui puisse, sur ce point, retracer les quelques vestiges de la loi naturelle gravée en leur cœur ! Une troisième raison de l’insensibilité japonaise vis-à-vis de la religion, c’est l’immoralité générale. Ceci n’est ni plus ni moins qu’épouvantable. Il est vrai qu’elle ne date pas d’aujourd’hui ni d’hier : elle est plusieurs fois séculaire. Seulement, autrefois elle faisait ses ravages surtout parmi les bonzes et les nobles. Aujourd’hui, elle est générale, et, de jour en jour, elle prend des proportions plus effroyables. C’est que la prospérité matérielle vient ajouter son poids énorme à celui déjà considérable