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PROPOS JAPONAIS

de saint François-Xavier : c’est à peine si des conférences religieuses peuvent attirer quelques auditeurs dans les salles publiques.

Bien plus, même l’instruction par groupes est impraticable. Les Japonais préfèrent et demandent positivement à être instruits un à un, en particulier ; et à cette exigence, voici deux raisons :

D’abord une raison de caste. La société japonaise comprenait autrefois quatre grandes classes distinctes : les nobles (kwazoku), les guerriers (shizoku ou samuraï), le commun du peuple (heimin) et les parias (eta). Aujourd’hui, officiellement, il n’y a plus que deux classes sociales : les nobles et le peuple. De plus, les parias sont presque tous disparus ou confondus avec le reste du peuple. Cependant, entre le shizoku et le heimin, la distance est encore loin d’être effacée. Les descendants des samurai, qui comptent parmi leurs ancêtres tant de preux chevaliers et de héros, et qui, d’ailleurs s’imposent toujours à l’admiration par leur droiture, leur honnêteté, leur franche loyauté et leur noble courtoisie, répugnent d’instinct à se mêler à la masse du peuple. Ainsi, par exemple, quand il s’agit de mariage, même s’ils sont chrétiens, ils tiennent rigoureusement à ne s’unir qu’à des personnes de leur rang. D’ailleurs, malgré tout, ils restent au milieu du peuple, comme hors de leur élément, et ils ne peuvent s’accommoder à toutes sortes de personnes indistinctement.

Il y a aussi la raison des affaires et des occupations. De plus en plus, devant l’envahissement rapide du progrès moderne, le Japonais abandonne son habitude traditionnelle de vivre au jour le jour, de ne jamais s’inquiéter du lendemain et par conséquent de ne jamais