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OBSTACLES À LA CONVERSION DU JAPON

préjugés dans l’esprit de ces gens. Il leur expliqua le vrai caractère de l’évangélisation catholique et la véritable mission de l’Église romaine. Ils écoutèrent en silence, sans opposer aucune objection ; mais lorsque le missionnaire se leva pour sortir, l’un d’eux souffla ceci à son voisin : « C’est un obstiné, il ne veut pas avouer ses véritables intentions ».

Encore si on se contentait de penser ainsi du missionnaire et de tout étranger. Mais par suite de ce regrettable préjugé, on pratique à son égard un espionnage tout exprès, avec l’autorisation formelle des administrations du pays. Naturellement c’est la police secrète et même publique qui est l’agent de cette odieuse surveillance. Tous les soirs, les policiers doivent faire connaître au gouvernement régional l’endroit où l’étranger de telle ou telle localité se prépare à passer la nuit. Si le missionnaire part en voyage, s’il fait une promenade dans le voisinage de la ville où il demeure d’ordinaire, aussitôt on expédie des télégrammes dans les directions où l’étranger paraît se rendre. Quelquefois même on l’arrête, poliment d’ailleurs, on lui demande son nom, son âge, d’où il vient, où il va et autres choses semblables.

Chez lui également, il reçoit de temps en temps la visite apparemment officieuse de gens obséquieux, gentils et causeurs, qui l’entretiennent pendant deux ou trois heures. Ils causent sans embarras de mille sujets divers. Ils parlent même de religion. Bien plus, ils vont jusqu’à demander à se faire chrétiens et apprennent parfois un bout de catéchisme. En réalité ces gracieux personnages sont des agents de la police secrète, qui viennent ainsi faire ces visites, pour tâcher de recueillir