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IMPORTANCE DE LA CONVERSION DU JAPON

début de l’histoire japonaise, tout ce qui précède n’étant que mythologie et légende. Ensuite ce fut le régime féodal, durant lequel le gouvernement du pays, bien que restant de droit le seul apanage de l’empereur, appartint de fait aux seigneurs, qui vivaient à peu près indépendants sur leurs terres et se faisaient la guerre pour les moindres différents. Au commencement du xviie siècle cependant, il avait régné dans l’empire une certaine unité, grâce à trois hommes de génie, Nobunaga, Hideyoski et Yeyasu, qui s’étaient posés en dictateurs et avaient dompté les seigneurs turbulents. Mais Yeyasu ayant fondé une dynastie, cette dictature ou Shôgunat devint plutôt un poste d’honneur pour le renom d’une grande famille, qu’une source de prospérité pour le pays : elle végéta. Ajoutons à cela, l’isolement farouche dans lequel le Japon s’était renfermé depuis les persécutions religieuses de 1614 à 1840. Par cette abstention volontaire de tout contact avec l’étranger, il se privait de tout stimulant pour son progrès national.

Mais depuis Meiji, le Japon est totalement changé à ce point de vue. Le régime féodal a fait place au régime constitutionnel, tel qu’il est en vigueur en plusieurs pays. Seulement, l’empereur au Japon reste tout-puissant, à cause du prestige unique qui le place au rang des divinités shintoïstes ; de sorte que, pratiquement, le régime actuel n’est que du pur absolutisme. De ce régime dépend toute une armée de fonctionnaires qui exécutent servilement les directions du gouvernement suprême.

Cette puissance singulière de l’autorité, en pays païen, est réellement étonnante. Il ne faut pas, cependant, en chercher l’explication dans le sentiment du devoir,