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grandeurs et misères d’une victoire

moins d’efforts méthodiques que les conquêtes de la guerre. Au vrai, c’est le problème permanent de l’humanité, puisqu’elle est toute d’activités concurrentes, et que, vivre socialement, c’est s’affronter toujours pour s’accorder passagèrement.

La guerre, officiellement achevée, se poursuit en des formes nouvelles, dites de pacification, des épreuves de concurrences liées à toutes expériences physiques et morales de l’homme, en action. sur sa terre, au profit d’un ordre social à réaliser.

La grande guerre a duré quatre interminables années, tandis qu’en dix années de méditations turbulentes nous n’avons pas encore été capables de mettre hommes et choses à leur place appropriée et de déterminer les successions d’activités coordonnées que commande la paix nouvelle.

Aux jours du suprême péril, il faut être partout à la fois, de jour et de nuit, au front, au conseil, à la tribune, aux postes de commandement où doivent se prendre les décisions les plus graves en leur forme d’immédiate exécution, cependant que des Alliés, qui sont demeurés des rivaux vaguement inquiets d’eux-mêmes et de nous, se tiennent à mi-chemin de la défensive et de l’offensive, tandis que des parlementaires professionnels décrètent qu’il était facile de mieux faire et s’offrent pour accomplir l’acte décisif qui sera le salut ou la catastrophe irréparable, selon qu’il appartiendra.

C’est au croisement de toutes ces divergences qu’il faut se reconnaître pour improviser des solutions hâtives dont l’issue décidera de la journée, et qui ne s’éclairciront que plus tard sous les yeux