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Il le considère un instant avec complaisance, ensuite il veut me le mettre en main ; d’abord un reste de honte me fit faire quelque difficulté de le prendre ; mais mon inclination était plus forte… Je rougissais et ma hardiesse augmentait à proportion du plaisir que je ressentais à ce contact. La corne ne pouvait être plus dure ni plus raide et le velours cependant plus doux ni plus moelleux au toucher. Il me guida ensuite à cet endroit où la nature et le plaisir prennent de concert leurs magasins, si convenablement attachés à la fortune de leur premier ministre.

La douce chaleur de ma main rendit bientôt mon amant intraitable ; et prenant avantage de ma commode position, il fit tomber l’orage à l’endroit où je l’attendais presque impatiemment et où il était sûr de toucher le but. Je ne sentis presque plus de douleur. Bien chez lui désormais, il me rassasia d’un plaisir tel, que j’en étais réellement suffoquée, presque à bout d’haleine. Oh ! les énervantes saccades ! Oh ! les innombrables baisers. Chacun d’eux était une joie inexprimable et cette joie se perdait dans une mer de délices plus enivrantes encore. Ces folâtreries, cependant, ces joyeux ébats avaient si bien pris la matinée, que force nous fut de ne faire qu’un du déjeuner et du dîner.

L’excès de la jouissance ayant à la fin calmé nos transports, nous nous mîmes à parler d’affaires. Charles m’avoua naïvement qu’il était né d’un père qui, occupant un modeste emploi dans l’administration, dépensait quelque peu au delà de son revenu. Le jeune homme n’avait eu qu’une bien médiocre éducation, il n’avait été préparé à aucune profession et son père se proposait seulement de lui acheter une commission d’enseigne dans l’armée, à cette condition toutefois qu’il pût en réaliser l’argent ou trouver à l’emprunter ; ce qui, d’une façon ou de l’autre, était plus à souhaiter qu’à espérer pour lui. Voilà, néanmoins, le beau plan sur lequel