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la défensive.

force de résistance que chacun d’eux considéré isolément ? Non, répondrons nous assurément, car pour arriver à la conclusion contraire il faudrait commettre l’une des deux erreurs suivantes :

1o On fait souvent confusion entre un terrain difficile et un terrain inaccessible. Là où on ne peut plus marcher en colonne avec de l’artillerie et de la cavalerie, on peut encore, dans la plupart des cas, continuer à s’avancer avec de l’infanterie, à laquelle on adjoint plus ou moins de bouches à feu, car la brièveté des mouvements pendant le combat permet de consacrer à l’exécution et à la réussite de ces mouvements une somme extrême d’efforts que l’on ne saurait exiger dans des marches de longue haleine. On voit par là que les flancs de chacun des postes peuvent souvent être menacés, et que c’est se faire illusion de croire à la grande cohésion du front d’une ligne ainsi formée.

2o Il arrive aussi que, de ce qu’un ravin, une pente rocheuse, un fort escarpement constituent de très bons points d’appui pour un petit poste, on considère comme absolument impénétrable à l’attaque une ligne de défense composée d’une chaîne de petits postes dont chacun, déjà très fort sur son front, est ainsi appuyé sur ses flancs. Mais il convient de se rendre compte que si ces accidents de terrain forment effectivement de très bons points d’appui, ce n’est pas en ce qu’ils rendent formellement impossible l’action de tourner les petits postes, mais seulement parce qu’ils imposent à l’attaque, dans l’exécution de cette manœuvre, une perte de temps et de forces précisément proportionnée à l’action qu’ils permettent à chacun des petits postes d’exercer isolément. L’envahisseur, qui veut et doit continuer à se porter en avant bien qu’il rencontre sur sa route un petit poste dont le front est inattaquable, n’hésitera pas à passer outre malgré les difficultés du