sur une route du Japon.
À droite. — Mon cher Jules, je vous demande pardon de vous tirer de votre somnolence, mais j’ai énormément de choses à vous dire.
À gauche. — Je suis tout oreilles.
À droite. — Vous souvenez-vous de cette conversation que nous eûmes à Lausanne en 1915 avec Stravinsky ?
À gauche. — À propos de Wagner, je suppose…
À droite. — Le reproche que Stravinsky adressait à la musique de Wagner...
À gauche. — C’est une pâte, — disait-il. — Je me souviens.
À droite. — Il n’y a jamais un son pur. Tout est amalgamé. Jamais n’est donnée à l’oreille la fête d’un timbre limpide. On n’entend jamais une flûte, ou un alto, ou la voix humaine, mais un mélange de tout cela.
À gauche. — D’abord n’y aurait-il pas deux musiques, l’une active et l’autre passive, l’une qui est voix et l’autre qui est oreille, une musique qui écoute ?
À droite. — Nous discuterons cela tout à l’heure. Je vous en prie, ne lancez pas sous mes pieds cette pomme d’Atalante !
À gauche. — Ce reproche du Russe, je l’ai retrouvé plus tard sous la plume de Debussy. Il prétend que souvent chez Wagner il est impossible de distinguer le violoncelle de la clarinette.