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l’esprit, l’un pour séparer les écoles des garçons de celle des filles qui etoient meslées, qui pouvoient causer du désordre ou qui étoit contre la bienséance, pour quoy[1] il avoit une extrême horreur de ce meslange, à la charge et condition que le maistre ne recevroit plus de filles à son école, et s’il luy arrivoit de contrevenir à la clause de laditte fondation, la rente qui luy étoit assignée devoit appartenir aux maistresses des filles, et si les maitresses arrivoient à tomber dans une semblable contravention, elles seroient de mesme privées de la leur. Le 2d motif étoit de former les enfans à la piété et par cette raison il les obligeoit d’aller tous les jours à l’église à la sortie des écoles sous la conduite des maistres et maitresses, chanter un salut et réciter publiquement les prières du soir avec l’examen de conscience, et deux jours de la semaine assister lesdites écoles aux catéchismes qu’il chargeoit les maistres et maistresses de faire à leurs écoliers et écolières.

Pour réussir dans son dessein, il forma une communauté de filles dans la ville de Marle pour enseigner les filles à qui il donna des règles qu’elles pratiquent avec bien de la fidélité, de la ferveur et de l’édification, enseignant les jeunes filles non seulement à lire, escrire et servir Dieu, mais à travailler à toutes sortes d’ouvrages de manière qu’elles font dans laditte ville un bien qui ne se peut exprimer. Cette communauté s’est augmentée considérablement et fait encore à présent autant de bien et mesme plus qu’alors. Elle a establi une communauté semblable à Crouy par la vigilance de feu M. Gilbert[2] Le Bègue curé doyen du détroit[3] qui est sur le mesme pied et avec laquelle elle est en société […]. Les évesques de Laon, qui ont reconnu le bien qu’elles faisoient les ont autorisées [p. 682] et messire Loüis de Clermont[4] évesque et duc de Laon, qui gouverne son diocèse avec toute la sagesse et l’attention qu’on peut souhaitter a donné à ces deux communautés des règles remplies de l’Esprit de Dieu qu’elles suivent avec bien de l’exactitude, en corrigeant, changeant et ajoutant aux anciennes.[5]

La guerre de Paris étant survenue et la France se trouvant en feu par la guerre des Princes à l’occasion du Ministre d’Etat, Matthieu Beuvelet fut pressé par ses supérieurs de recevoir la prestrise. Il y

  1. Comprendre : c’est pourquoi ils…
  2. Lecture conjecturale.
  3. Ce terme désigne l’étendue d’une juridiction (Richelet, Nouveau dictionnaire françois, Genève, 1710, t. 1).
  4. Louis Annet de Clermont de Chaste de Roussillon fut sacré, évêque de Laon le 6 novembre 1695. Il mourut en 1721 (Armand Jean, Les évêques et les archevêques de France, Paris, 1891, p. 323).
  5. CL 38, p. 54, n° 5, d’après une communication de M. le chanoine Hesse, du chapitre de la cathédrale de Reims : « Fondées en 1647 par Mathieu Beuvelet, les Filles de Sainte-Benoîte s’occupaient de l’enseignement des filles. Parallèlement, il organisa une communauté de maîtres pour les garçons qui, à partir de 1684, se recrutèrent dans une communauté de Frères enseignants (clercs et laïcs) fondée par M. Grenier, doyen de Marle et dont les frères Louis et Martin Daoust furent les premières recrues. »