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dans nos coutumes cet état de question se présente souvent ; car les édits de nos préteurs admettent plusieurs fins de non-recevoir ; et suivant notre droit civil, on perd sa cause quand on ne suit pas les formes prescrites. Aussi la plupart des récusations se font-elles devant le préteur ; car c’est à lui que s’adressent les demandes de fin de non-recevoir ; c’est lui qui donne, en quelque sorte, le pouvoir d’intenter une action, et qui règle la forme à suivre dans les affaires particulières. Les récusations ont donc rarement lieu devant les tribunaux ; et même, quand cela se rencontre, elles sont ordinairement peu fondées, et il faut, pour les appuyer, y joindre quelque autre état de question. Je citerai cet exemple « Dans une accusation d’empoisonnement, la cause présentée comme parricide et inscrite hors de son rang, les dépositions des témoins et les arguments de l’accusateur chargent le coupable de différents délits, et ne font que mentionner le parricide : il faut alors que le défenseur insiste vivement et longtemps sur ce point. Si l’on n’a pas prouvé le meurtre du père, c’est une injustice criante « que d’infliger le châtiment des parricides ; ce qui doit nécessairement arriver si nous sommes condamnés, puisque la cause est inscrite hors de son rang comme parricide. S’il est injuste d’infliger cette peine à l’accusé, il est également injuste de le condamner, puisque sa condamnation entraîne nécessairement cette peine. » Le défenseur, en demandant par la récusation le changement de la peine, détruira toute l’accusation ; et de plus, il appuiera sa récusation par la question de fait, en se justifiant sur tous les autres chefs dont on l’accuse.

XX. Prenons pour exemple de récusation, dans la cause, le fait suivant : « Des gens armés, venus pour faire une violence illégale, furent repoussés par d’autres gens armés, et un cavalier romain, en se défendant, eut la main coupée par un des agresseurs. Le blessé intente une accusation de voies de fait. L’accusé demande au préteur qu’on ajoute cette restriction : A MOINS QUE CE NE SOIT NUIRE A UN HOMME ACCUSÉ DE CRIME CAPITAL. L’accusateur veut un jugement simple ; l’accusé exige qu’on y ajoute cette restriction. — Faut-il admettre ou non la restriction ? voilà la question. — il ne faut point, dans une cause portée devant de simples commissaires, prononcer d’abord sur un crime qui regarde le tribunal chargé des assassinats. » Voilà la raison. — Voici la réponse : « Les voies de fait sont telles, qu’il serait indigne de ne pas prononcer le plus tôt possible un jugement. » Le point à juger est donc : « La « gravité des voies de fait est-elle une raison suffisante pour qu’on prononce, tandis qu’il ne s’agit encore que de cette cause, sur un délit plus grave, dont le jugement appartient à un autre tribunal ? » Voilà pour cet exemple. Mais les deux parties doivent, dans toute cause, chercher par qui, avec qui, de quelle manière et dans quel temps il faut intenter l’action ou porter le jugement.

Vous devez ici avoir recours au droit dont nous I parlerons plus bas, et montrer, par vos raisonnements,