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manus Macedonum transvolasset. Alexandrum omnes, ut maxime metuerunt, item plurimum dilexerunt. » Ici c’est un seul nom auquel on a fait parcourir ses différents cas ; voici une autre annomination dans laquelle on a fait subir les mêmes changements à plusieurs mots : « Tib. Gracchum, rempublicam administrantem, indigna prohibait nex diutius in ea commorari. C. Graccho similiter occisio obtata est, quae virum reipublicae amantissimum subito de sinu civitatis eripuit. Saturninum, fide captum malorum, perfidiae scelus vita privavit. Tuus, o Druse, sanguis domesticos parietes et vultum parentis adspersit. Sulpicium, cui paullo ante omnia concedebant, eum brevi spatio non modo vivere, sed etiam sepeliri prohibuerant. » Ces trois sortes de figures qui se ressemblent, et que nous venons de définir, ne doivent être que très rarement employées, quand on parle sur des sujets réels, parce qu’elles semblent ne pouvoir être le fruit que du travail et des efforts.

XXIII. Mais de semblables recherches semblent plutôt faites pour l’agrément que pour la vérité ; c’est pourquoi l’autorité, la gravité, la noblesse oratoire perdent à l’usage fréquent de ces figures. Et non seulement l’orateur perd son crédit, mais encore il blesse l’auditeur, lequel ne trouve dans ce style qu’un jeu d’esprit et de l’affectation, et point de dignité ni de vraie beauté. Les choses larges et belles peuvent plaire longtemps ; celles qui ne sont que jolies et mignardes fatiguent bientôt l’oreille, le plus dédaigneux de nos sens. De même qu’en multipliant ces sortes de figures, nous paraîtrons nous plaire à des puérilités de style ; de même en les employant avec réserve et en les répandant avec variété dans tout le discours, nous y mettrons la lumière et l’agrément.

La Subjection est une figure par laquelle, après avoir interrogé nos adversaires, ou nous être demandé à nous-mêmes ce qu’ils peuvent alléguer pour eux ou contre nous, nous indiquons aussitôt après ce qu’il faut ou ne faut pas dire ; ce qui est favorable à notre cause, ou contraire à la leur. Par exemple : « Je demande donc comment cet homme « est devenu si riche. Lui a-t-on laissé un ample patrimoine ? mais les biens de son père ont été vendus. Lui est-il survenu quelque héritage ? non, puisque tous ses parents l’ont déshérité. A-t-il gagné ou fait gagner quelque procès ? non seulement il n’en est rien, mais il a été obéré pour avoir donné caution dans une affaire considérable. Si donc, comme vous le voyez, il ne s’est enrichi par aucun de ces moyens, ou bien il a chez lui une mine d’or, ou bien il « est arrivé à la fortune par des moyens illicites. »

XXIV. — Autre exemple : « Souvent, juges, j’ai vu des accusés chercher leur appui dans quelque motif honnête que leurs ennemis eux-mêmes n’auraient pu repousser ; mon adversaire n’en peut invoquer de semblable. Trouvera-t-il une sauvegarde dans les vertus de son père ? mais vous l’avez condamné à mort. Fera-t-il un retour sur sa vie passée pour montrer qu’elle fut