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Claude Paysan

l’air, tant de travail absorbant aux moissons, qu’il parvenait à oublier l’absence de son ami ; mais le soir, à l’heure où depuis si longtemps il s’était habitué à entendre son pas alerte sur le perron, il sentait toujours un serrement de cœur incontrôlable…

C’est alors qu’il lui fallait s’efforcer de prendre un air insouciant et enjoué pour parler et sourire à sa mère…

… Ce soir-là, il avait essayé, mais il n’en avait pas été capable. Trop de choses s’agitaient dans son cerveau, venaient, malgré lui, figer son sourire sur ses lèvres. Et il était monté pour se coucher.

… Encore cette parole du père Pacôme qui lui revenait : « Celle-là n’est pas pour toi »… Mon Dieu ! pourquoi la lui avoir répétée ?… il le savait bien assez pourtant. Qu’importe, il y pensa longtemps à « celle-là qui n’était pas pour lui. »

… Ses pauvres fleurs, autrefois si blanches, étaient presque toutes séchées dans leur pot, maintenant. Les pétales s’en détachaient au moindre souffle. Il y en eut même deux, plus jaunis, plus fanés qui tombèrent sur la table, sous l’imperceptible mouvement qu’il leur avait imprimé de son haleine, en les regardant de trop près. Il les prit alors dans ses mains pour les examiner comme des petites choses étranges et mystérieuses… Ils avaient gardé leur même forme d’autrefois ; les nervures seulement s’accusaient davantage à cause de cette coloration fumeuse de cire vieillie qui leur était venue de chaque côté.