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XXXII
MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

Il a terminé le récit des deux premières parties de sa vie, de sa carrière de voyageur et de soldat et de sa carrière littéraire ; il lui reste à raconter sa carrière politique. En réalité, c’est un ouvrage nouveau qu’il va écrire ; et par où le pourrait-il mieux commencer que par un portrait de Bonaparte, une vue — à vol d’aigle — du Consulat et de l’Empire, préface naturelle de ces prodigieux événements de 1814 qui, en changeant la face de l’Europe, donneront du même coup à la vie de Chateaubriand une orientation nouvelle ? Seulement, il lui arrive avec Napoléon ce qui était arrivé à Montesquieu avec Alexandre. Il en parle, lui aussi, tout à son aise[1]. Il lui consacre les deux premiers livres de sa troisième partie. Déjà, dans sa première partie, il avait esquissé à grands traits le tableau de la Révolution, de 1789 à 1792. Voici maintenant une vivante peinture de Napoléon et du régime impérial. Nous aurons plus tard un éloquent récit de la Révolution de 1830 : trois admirables décors pour les trois actes de ce drame, qui fut la vie de Chateaubriand et qu’il a lui-même encadré, suivant la mode romantique du temps, entre un prologue et un épilogue, entre la description du château de Combourg, qui ouvre les Mémoires, et les considérations sur l’avenir du monde, qui les terminent. Pour ma part, je ne sais pas d’ouvrage, dans la littérature contemporaine, dont le plan soit plus parfait, dont l’ordonnance soit plus savante et plus belle.

En tout cas, il me semble bien que je ne me suis pas trop avancé en disant que les Mémoires d’Outre-tombe, ainsi divisés en parties et en livres, prennent une physionomie nouvelle. Par suite de cette division en livres, plus de ces subdivisions incessantes, de ces chapitres, de deux à trois pages chacun, qui venaient à tout instant interrompre et couper le récit. Les sommaires qui, intercalés dans le texte, en détruisaient la continuité et la

  1. Esprit des lois, liv. X, chap. XIII.