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MÉMOIRES D’OUTRE-TOMBE

même cette belle main ; je me retirai tout troublé. Je partis le lendemain pour Cambrai. Qui était cette dame de Chastenay[1] ? Je n’en sais rien : elle a passé comme une ombre charmante dans ma vie.


Le courrier de la malle me conduisit à ma garnison. Un de mes beaux-frères, le vicomte de Chateaubourg (il avait épousé ma sœur Bénigne, restée veuve du comte de Québriac[2]), m’avait donné des lettres de recommandation pour des officiers de mon régiment. Le chevalier de Guénan, homme de fort bonne compagnie, me fit admettre à une table où mangeaient des officiers distingués par leurs talents, MM. Achard, des Mahis, La Martinière[3]. Le marquis de Mortemart

  1. Ce n’était pas la comtesse Victorine de Chastenay, l’auteur des très spirituels Mémoires publiés en 1896 par M. Alphonse Roserot. Mme Victorine de Chastenay n’avait que quinze ans en 1786. Elle a raconté elle-même comment elle vit Chateaubriand, pour la première fois, non chez elle en 1786, mais beaucoup plus tard, sous le Consulat, à un dîner chez Mme de Coislin, auquel assistait : « l’auteur du Génie du Christianisme », alors dans tout l’éclat de sa jeune gloire. Mémoires de Mme de Chastenay, T. II, p. 76.
  2. La comtesse de Québriac, Bénigne-Jeanne de Chateaubriand, avait épousé en secondes noces, à Saint-Léonard de Fougères, le 24 avril 1786, Paul-François de la Celle, vicomte de Chateaubourg, capitaine au régiment de Condé, chevalier de Saint-Louis, né à Rennes le 29 février 1752. — De ce dernier mariage sont nés plusieurs enfants, et notamment un fils, Paul-Marie-Charles, devenu chef de nom et armes, né en 1789, décédé en 1859, laissant plusieurs fils qui ont continué la postérité.
  3. L’État militaire de la France pour 1787, à l’article Régiment de Navarre, donne sur ces officiers les indications suivantes : M. de Guénan, lieutenant en premier ; M. Berbis des Maillis (et non des Mahis), lieutenant en second ; La Martinière, lieutenant en second ; Achard, sous-lieutenant.