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dresser une lettre pour demander votre mise en liberté sous caution. » Je le remerciai, tout en lui témoignant que je préférais rester quelques jours de plus en prison et vider cette autre affaire.

La liberté sous caution m’a toujours paru une étrange chose ; il me semble que la liberté devrait être de droit commun et non la prison.

Comme beaucoup d’autres je m’étais moqué de la définition de la liberté insérée dans le projet de constitution soumis à l’assemblée nationale. Armand Marrast avait mis que la liberté était le droit d’aller et de venir ; je trouvais cela puéril, j’ai changé d’avis au fort de la Vitriollerie, malgré l’amabilité de mes gardiens.

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L’ATTENTE.


En vain, le jour succède au jour.

..........

Ah ! si du moins, dans nos années,
Les jours perdus ne comptaient pas.
Lamartine.


Réintégré au fort de la Vitriollerie, je dus réfléchir sur cette nouvelle accusation à laquelle il me fallait répondre, que pouvait-elle être ? je cherchais vainement et plus je cherchais moins je trouvais. On peut envisager de sang-froid un péril connu mais on n’est pas aussi rassuré devant un danger imaginaire. Justement parce qu’on ne pouvait m’accuser de rien, je craignais tout, car la nouvelle accusation ne pouvait être qu’une calomnie et dès lors, mes ennemis avaient pu ourdir leur trame avec habileté ; dans tous les cas ma libération était subordonnée à l’inconnu.


Mais ! dans ce noir chaos, dans ce vide sans terme,
Mon âme sent en elle un point d’appui plus ferme,
La conscience ! ..........[1]


Un ami, M. Delorme, s’empressa de m’apprendre, le lundi 2 juillet, que le conseil avait délibéré sur mon interrogatoire et ordonné ma mise en liberté. Je dus croire qu’on avait écarté cette seconde accusation, mais la journée se passa et le jeudi suivant, j’appris que M. Delorme avait été induit en erreur, qu’il me fallait absolument répondre de nouveau ; ce ne fut que le dimanche 8 juillet, que j’appris ce dont il s’agissait.

La nouvelle accusation à laquelle j’avais à répondre était préci-

  1. Alph. Lamartine, Harmonies.