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On est heureux d’avoir à exprimer ainsi la dette de la reconnaissance.

Chaque jour nous a montré dans les soldats du génie et les pontonniers, des frères. Qu’ils en reçoivent nos remercîments sincères !

Nous nous organisâmes par brigades composées de 10 hommes qui se groupèrent suivant leurs sympathies ou le hasard, et qui élurent chacune un chef. Je fus élu chef de la centaine par acclamation. Le lendemain je soumis au même genre d’élection la nomination d’un lieutenant et d’un sergent-major.

Par ces mesures un ordre plus grand fut établi et appela sur nous la bienveillance de nos gardiens. On comprit que nous étions des hommes d’ordre, et la règle fut d’autant plus douce qu’on nous vit moins susceptibles d’abuser de son relâchement.


visites. — les sœurs. — les ecclésiastiques.


Sunt lacrymæ rerum et mentem mortalia tungunt.
Virg.


Nous n’avions encore vu personne et nous ignorions si nous étions au secret, nous voulions rassurer nos familles et en même temps rendre hommage à la conduite fraternelle des militaires qui nous gardaient. La lettre suivante que je rédigeai sur la demande de mes camarades, et qu’ils s’empressèrent de signer, a paru dans le Courrier de Lyon du 23 juin.

Lyon, le 21 juin 1849.
Monsieur,

Nous vous prions de vouloir bien insérer la présente dans votre plus prochain numéro, elle a pour but de rassurer nos familles et nos amis sur notre sort d’après les bruits qui circulent selon ce que nous avons appris, c’est un devoir de conscience pour nous. Sauf la liberté, depuis que nous sommes entrés au fort de la Vitriollerie, nous n’avons rien à désirer et notre santé est parfaite. Il y aurait de l’ingratitude de notre part à ne pas rendre hautement justice à la bienveillance de M. le commandant du fort, du lieutenant chargé spécialement de notre garde et de tous les officiers, sous-officiers et soldats. Ils nous ont accueilli comme des frères malheureux et nous leur en garderons une éternelle reconnaissance.

Nous ne demandons qu’une chose, une prompte instruction qui abrége notre prison préventive, parce que la prison préventive est notre ruine et celle de nos familles.

Nous avons confiance en nos juges quels qu’ils soient, et nous n’agiterons pas

    souvenir, en cette occasion, des rapports antérieurs que j’avais eu avec lui ; j’en ai aussi de personnelles au lieutenant Ledoux, mais ces faveurs dont je conserverai un éternel souvenir, et qui ont adouci ma captivité, intéresseraient peu le public.