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zele, affection. Qui ne faict le premier, est accusé de n’avoir aucune charité : qui ne faict le second, est suspect d’estre froid, et n’avoir le zele ou la suffisance qu’il faut, et n’estre amy. On a voulu faire valoir ces deux opinions outre raison et mesure : et n’y a rien que l’on n’aye dict là-dessus ; car les chefs souvent preschent les choses selon qu’elles servent, et non selon qu’elles sont : et souvent les opinions les plus vrayes ne sont pas les plus commodes. Et puis voyant que nous ne tenons que trop à nous, et d’une attache trop naturelle, ils nous en veulent distraire et tirer au loin, comme pour redresser un bois courbé on le recourbe au rebours. Mais ces opinions mal entendues et mal prinses, comme elles sont de plusieurs, apportent de l’injustice, du trouble, de la peine, et du mal beaucoup, comme l’on peust voir en ceux qui mordent à tous, se donnent à louage et s’asservissent à autruy ; non seulement ils se laissent emporter et saisir, mais encore ils s’ingerent à tout, autant à ce qui ne les touche comme à ce qui les touche, aux petites comme aux grandes, et souvent non pour autre chose que pour s’embesongner et s’agiter, (…),