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et la suffisance. Le sage ne fera ny l’un ny l’autre, selon le souhait et priere de Salomon, ny richesse ny poureté ; mais les tiendra en leur rang, les estimant ce qu’elles sont, chose de soy indifferente, matiere de bien et de mal, utiles à beaucoup de bonnes choses. Les maux et miseres, qui sont à l’affectionner et à hayr les biens, ont esté dicts cy-dessus : voyci maintenant la reigle en la mediocrité, qui est en cinq mots. 1 les vouloir, mais ne les aymer poinct : sapiens non amat divitias, sed mavult . Tout ainsi que l’homme petit et foible de corps voudroit bien estre plus haut et plus robuste, mais c’est sans s’en soucier et sans s’en donner peine ; cherchant sans passion ce que la nature desire, la fortune ne nous en sçauroit priver. 2 encore beaucoup moins les chercher aux despens et dommage d’autruy, ou par arts et moyens lasches et sordides, affin que personne ne nous les pleure, plaigne ou envie, s’il n’est malicieux. 3 advenans et entrans par la porte honneste de devant, ne les rebuter, ains gayement les accepter et recepvoir en sa maison, non en son cœur ; en sa passion, non en son amour, comme n’en estant dignes. 4 les ayant, les employer honnestement et discrettement