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qu’il adviendra sans se tourmenter à l’empescher. Celuy-là estudie à ranger les evenemens, cestuy-ci soy-mesme : celuy-là semble plus courageux, cestuy-ci joue au seur : celuy-là est suspens, agité entre la craincte et l’esperance ; cestuy-ci se met à l’abry, et se loge si bas qu’il ne peust plus tomber de plus haut. La plus basse marche est la plus ferme et le siege de constance. Celuy-là travaille d’en eschapper, cestuy-ci de souffrir, et souvent cestuy-ci en a meilleur marché. Il y a souvent plus de mal et de perte à plaider qu’ à perdre, à fuyr et se donner garde qu’ à souffrir. L’avaricieux se tourmente plus que le pauvre, le jaloux que le cocu. En celuy-là est plus requise la prudence, car il agist ; en cestuy-ci la patience. Mais qui empesche que l’on ne faict tous les deux par ordre, et que là où la prudence et vigilance ne peust rien, y succede la patience ? Certes aux maux publics il faut essayer le premier, et y sont tenus ceux qui en ont la charge et le peuvent : aux particuliers chascun choisisse son meilleur. Ii maux et accidens presens, pressans et extremes.

le moyen propre pour alleger les maux et addoucir les passions, ce n’est pas s’y opposer, car l’opposition les picque et despite dadvantage. On aigrit et irrite le mal par la jalousie du debat et du contraste ; mais c’est ou en les destournant et divertissant ailleurs, ainsi que les medecins,