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la vertu de justice, à cause des doubtes et difficultez qui proviennent des accidens et necessitez des estats, et qui empeschent souvent les plus resolus et advisez. Après la justice vient la vaillance. J’entends la vertu militaire, la prudence, le courage et la suffisance de bien guerroyer, necessaire du tout au prince, pour la deffense et seureté de soy, de l’estat, de ses subjects, du repos et de la liberté publicque, et sans laquelle à peine merite-il le nom de prince. Venons à la quatriesme vertu principesque, qui est la clemence ; vertu qui faict incliner le prince à la douceur, remettre et lascher de la rigueur de la justice avec jugement et discretion. Elle modere et manie doucement toutes choses, delivre les coulpables, releve les tombez, sauve ceux qui s’en vont perdre. Elle est au prince ce que au commun est l’humanité : elle est contraire à la cruauté et trop grande rigueur, non à la justice, de laquelle elle ne s’eslongne pas beaucoup, mais elle l’adoucit, la manie : elle est très necessaire à cause de l’infirmité humaine, de la frequence des fautes, facilité de faillir : une grande et continuelle rigueur et severité ruine tout, rend les chastimens contemptibles, (…) ; irrite la malice ; par despit l’on se faict