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292 DE LA SAGESSE,


CHAPITRE II.

Première partie de cette prudence politique et gouvernement d estât qui est de la provision *r.

Sommaire. — La première chose nécessaire à celui qui est à la tête des affaires publiques, est de connaître l’état qu’il dirige ; la seconde, d’avoir les vertus d’un souverain, la piété, la justice, la valeur et la clémence. Ainsi, le prince doit maintenir la religion, qui est l’appui de la société ; la justice, qui consiste à observer et à faire observer les lois avec impartialité. Il faut convenir pourtant que la justice des rois n’est pas celle des particuliers ; que les princes ne peuvent quelquefois réussir dans des projets utiles au peuple, qu’en prenant des voies détournées ; qu’il se présente des occasions où suivre la raison et l’équité, ce serait trahir l’état. Ils doivent aussi être défians, mais sans le paraître. La dissimulation, comme dit Cicéron, ouvre le front et couvre la pensée. Il est d’autres maximes d’état qu’il serait dangereux d’établir en principes ; par exemple : faire mourir, sans forme de justice, un criminel diminuer la puissance et la popularité d’un citoyen qui pourrait devenir redoutable au souverain ; dans une famine, ou dans quelque besoin urgent, s’approprier les richesses des particuliers opulens, pour les répandre sur le peuple ; casser des privilèges extorqués autrefois à la faiblesse des rois, et qui paralysent l’autorité souveraine, etc. etc. Il est des hommes qui ne craignent point d’avancer que tout cela est permis aux princes. Cette opinion est bien hardie : Prévoyance, comme nous parlons aujourd’hui.