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de sagesse, est aussi pernicieux et dangereux, principalement en l’execution ; car l’on dict qu’il est permis d’estre en la deliberation et consultation poisant et long, mais non en l’execution, dont les sages disent qu’il faut consulter lentement, executer promptement ; deliberer à loysir, et vistement accomplir. Il s’est bien veu quelquesfois le contraire, que l’on a esté heureux à l’evenement, encore que l’on aye esté soudain et temeraire en la deliberation : (…) ; mais c’est rarement et par coup d’adventure, à quoy ne se faut pas reigler, et se bien garder que l’envie ne nous en prenne ; car le plus souvent une longue et inutile repentance est le salaire de leur course et hastiveté. Voyci donc deux escueils et extremitez qu’il faut pareillement esviter ; car c’est aussi grande faute de prendre l’occasion trop verte et trop cruë, que la laisser trop meurir et passer : le premier se faict volontiers par les jeunes, prompts et bouillans, qui, à faute de patience, ne donnent pas loysir au temps et au ciel de faire rien pour eux ; ils courent et ne prennent rien : le second par les stupides, lasches et trop lourds. Pour cognoistre l’occasion et l’empoigner, il faut avoir l’esprit fort et esveillé, et aussi patient : il faut prevoir l’occasion, la guetter,